Slaap – EP

Un premier 45 tours, Iceberg Alley/After & Tomorrow, en 2016 pour faire connaissance. Deux titres seulement accompagnés d’un supplément numérique, ces trois-là posant les bases de la musique de Slaap : post-punk aux accointances noise, ténu et froid, chanté en Anglais ; basse, guitare et batterie sur un pied d’égalité, personne ne prenant vraiment les devants mais toutes participant à l’élaboration d’un climat pour le moins congelé d’où émerge néanmoins une vraie urgence. Déjà, on aime beaucoup.
Vint ensuite Daisy en 2016, un titre unique et numérique caché sous une très chouette pochette. Rien n’avait fondamentalement changé exceptées peut-être la voix (empruntant un peu moins à la doxa Curtisienne) et la batterie (un poil plus en avant). Pour le reste, la même coloration ciel de traîne et tourmentée, la guitare brodant méticuleusement ses arabesques contrites sur le dos de la basse désossée. Il se passait vraiment un truc avec ce groupe.
Aujourd’hui, c’est l’heure de l’EP, sobrement intitulé EP et comprenant – c’est la fête ! – quatre nouveaux morceaux. On y retrouve la même sécheresse et tout le mordant d’un trio aussi élégant que mal peigné. La basse trace les contours au gros feutre noir, la guitare déborde, bien aidée par les cymbales, la voix se fait plus souple et avec ces armes somme toute minimales, Slaap montre une envergure et une variété nouvelles révélées par l’enchaînement des quatre titres. C’est la confirmation, on est tout acquis à la petite musique que les enceintes déversent à grande eau.

Slaap est tout à la fois archétypal et singulier. Il reprend à son compte les tables de la Loi post-punk mais parvient surtout à exister entre elles ou légèrement à côté.
On retrouve là-dedans la basse tracassée réglementaire, la guitare ténue et la voix rigide mais aussi tout un tas de petits trucs suffisamment barbelés pour égratigner la surface qui sans ça serait bien trop lisse : la batterie qui déborde (You Are The Only One), quelques riffs-cisailles un brin garage (Black Ain’t No Color), la basse qui enclume parfois (Darkwater) et surtout, l’urgence épileptique même dans les moments les plus aériens (les gazouillis aigus et très bien vus de Die Now).
Très bien construits et franchement magnétiques, ces quatre titres abrasifs et froids (captés par le groupe, masterisés par Julien Louvet, gage incontestable de qualité) sont en plus livrés sous une très belle pochette sérigraphiée (une constance depuis le début, ça) empruntée à la série Barrière de Matthias Picard où le sombre se montre clair et le clair, incontestablement sombre. Ainsi, rien n’a été laissé au hasard et l’EP est une magnifique réussite dans toutes ses dimensions.
Slaap maîtrise ses envies et on attend désormais impatiemment son premier long-format. Pour l’heure, ruez-vous sur tout ce que les Strasbourgeois ont enregistré jusqu’ici, il y a de quoi largement flinguer le mercure délirant de cet été à la con et adopter des petits compagnons de bruit qui vous accompagneront longtemps.

Brillant.

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