Fire! Orchestra ‎- Second Exit

Sur le thème « Let’s get in on – Le disque qui vous donne envie de jouer des hanches… et pas pour danser… » de la 8ème édition du Grand Jeu sans Frontières des Blogueurs Mangeurs de Disques.

 

Dans le respect phonétique du thème imposé, voilà un disque qui joue des anches, et pas pour faire danser. A condition de s’imaginer dans l’arrière-salle de quelque club lynchien, c’est tout juste si l’on pourra se trémousser lascivement en face-A, le trio suédois et son orchestre improvisé renouant avec la vénéneuse sensualité de big band enfiévré mais feutré que distillait dans sa première moitié l’Exit! originel. « Fire stay with me » s’exclame d’ailleurs à plus d’une reprise la pythie Mariam Wallentin, déjà maître de cérémonie sur les passages vaudou de l’opus précédent sorti l’an dernier par Fire! avec sa bande organisée d’une bonne trentaine de musiciens, « réduite » à 13 membres sur cette suite enregistrée live au festival de jazz nantais Les Rendez-vous de l’Erdre en septembre 2012, soit quelques mois avant leur début sur album.

 

Bientôt doublées des babillages de soprano déglinguée de Sofia Jernberg (vocaliste de Paavo et Seval), les incantations de la chanteuse de Wildbirds & Peacedrums semblent alors mener la danse des cuivres et des percus mais ne nous y trompons pas, celui qui joue des anches de son saxo hanté par les esprits en constant corps à corps d’Ornette Coleman et David Lynch c’est bien Mats Gustafsson (The Thing), décidément adepte des trios puisqu’on l’avait déjà croisé ici aux côtés de Paal Nilssen-Love et Mesele Asmamaw ou encore associé à Merzbow et Balázs Pándi. Sans oublier bien sûr les albums de Fire! et notamment celui-ci qui nous permettra d’introduire la guitare du fidèle Oren Ambarchi, discrète mais bien présente par petite touches sépulcrales aux sommets des pics d’intensité cacaphoniques des deux parties, au même titre que le piano déstructuré de Sten Sendell et les bidouillages saturés de Joachim Nordwall (dont l’impressionnant Monstrance de l’an passé en collaboration avec Mika Vainio n’a pas fini de nous tarauder).

 

Frénétique, le Fire! Orchestra ? Pas si simple. Car à l’issue d’un crescendo jazz-rock complètement dingo que vous parviendrez peut-être à danser si vous avez le diable au corps, l’agilité disloquée d’un fakir et la résistance au vertige d’un derviche tourneur, la face-B tourne sans crier gare au purgatoire jazz-ambient, bégaiements angoissés, percussions erratiques et basse menaçante traînant leur tension atonale dans un silence de plomb. Jusqu’à ce que les cuivres émergent de ce théâtre d’ombres pour le faire basculer dans la farce pour fantômes en fête à coups de fulgurances décadentes, disparaissant à nouveau comme ils étaient venus au détour des micro-secousses d’un no man’s land électronique avant de tout donner dans un ultime déferlement cathartique, que viendra finalement dissiper le crépuscule du piano laissé seul à sa fuite morbide et sans issue.

 

Rabbit

Édité à 500 exemplaires vinyle, l’album est toujours disponible sur le site de Rune Grammofon. La face-A pour vous faire une idée :

14 thoughts on “Fire! Orchestra ‎- Second Exit

  1. Etienne, on t’a chouré le jeu de mots avec anches ! Va vite sauver ton honneur, et leur casser la gueule. 😉

    Plus sérieusement, si je ne m’étais pas obligé à prendre des disques postérieurs à
    2000, j’aurais pris Pharoah Sanders – Black Unity. Donc je comprends tout à fait ton choix, le free ça peut être excellent dans ce thème.

    En revanche, ça peut faire fuir aussi, il faut se renseigner sur la demoiselle avant de passer un Ornette Coleman ^^

    1. Aha mince, improvisé ce matin avant de décoller, je n’avais encore lu aucun billet !

      Nous on s’est quasiment obligé à choisir de disques de 2014, autant dire que pour le thème en question le détournement s’imposait. 😉

  2. rhhoo, encore une glissade..même si Alex parle de postérieur.. bien ouej, en plus j’aime beaucoup ce groupe, comme Rune d’ailleurs..

    1. Ça ne me surprend pas du tout ! 😉 Sur le thème et du même label j’ai failli partir sur Jenny Hval, celle qui « débarquait en ville avec une brosse à dents électrique pressée sur le clitoris » en ouverture de l’album Viscera… mais j’en avais déjà vaguement parlé ailleurs !

  3. Ce disque aurait plutôt tendance à me coller des angoisses. Sans dèc, moi je ne mets pas un disque comme ça pour emballer une nana… ou alors une bien flipée !!!!!

  4. Effectivement ils sont nombreux à nous avoir vanté les charmes du soleil africain ou sud-américain aujourd’hui alors qu’on a la Suède tout près … mais comme Keith je mettrais le CD sur pause avant, de toute façon je mets tous les CD sur pause avant.

  5. Carrément Lynchien ! A l’écoute du titre mis en écoute (surtout la partie du début instrumentale), on jurerait un morceau issu de « Mulholland Drive », un de mes films cultes d’un de mes cinéastes fétiches !!
    En parlant de ce film, j’ai eu l’occasion de le voir au cinéma de Bourg en Bresse La Grenette dans le cadre de la superbe expo d’Art Contemporain « Au-Delà de mes rêves ». Grand moment que de le redécouvrir sur grand écran, en salle obscure. Mais je m’égare.
    Super choix, comme d’habitude….et que de références, bravo !!!
    A +

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