Crime Of Passing – Crime Of Passing

Date de sortie : 22 avril 2022 | Labels : Feel It Records (versions numérique et vinyle), Future Shock (version cassette)

Encore un groupe totalement inconnu me concernant, découvert comme ça, en me baladant – comme souvent – dans les allées numériques de Feel It Records. Le truc s’appelle Crime Of Passing, débarque de Cincinnati et compte aujourd’hui cinq membres alors qu’au départ, c’était le projet d’une seule personne (Dakota Carlyle qui gère aussi Future Shock, label basé dans la même ville qui sort la version cassette de l’album). Bon alors, inutile de tourner autour du pot, c’est du post-punk industriel option très très cold mais aussi joliment mordant. Oui oui, inutile de refréner le bâillement et l’air las que ces mots provoquent désormais, je sais bien que ça n’est pas gagné. Pourtant, il serait dommage de se priver de ce très chouette éponyme parce qu’il s’y passe pas mal de choses.

D’abord, le son absolument dégueulasse, offrant un écrin idoine à des morceaux qui, au fond, ne valent pas bien mieux. Chez Crime Of Passing, on aime bien quand ça déborde et quand ça vrille. Rien ne semble jamais totalement fixé si ce n’est le souffle arachnéen qui traverse chaque titre.
Ensuite, le groupe dégaine des armes métamorphes qui apparaissent puis disparaissent sans jamais rester très longtemps : on y entend de temps en temps une batterie en plastique, parfois un saxophone, souvent des guitares incisives, pas mal de chœurs et de nappes morbides et des lignes de basse fidèles à la doxa ’80s. Mais c’est rarement tout ça en même temps et du coup, les morceaux, tout en se ressemblant, ne sont jamais les mêmes.
En outre, malgré le côté congelé, tout cela se montre systématiquement bouillonnant et l’indéniable énergie de l’ensemble emporte facilement les accents suspects décelés ici ou là (des lignes de synthé trop évidentes voire stéréotypées, le tatapoum en conserve, etc.).
Enfin, au fur et à mesure que les morceaux défilent, on entraperçoit également une certaine vibration krautrock dans l’arrière-plan qui, en se mêlant au son sale, entraîne un effet bizarrement hypnotique, pas vraiment franc mais bien réel.

Crime Of Passing plante les crocs d’emblée via le très efficace Off My Shoulders – riff entêtant, voix criée pleine de morgue, rythmique psychorigide – puis desserre ou non son étreinte sur les suivants. Souvent très cold (Damrak, Vision Talk), parfois bien punk (Tender Fixation) mais souvent tout ça en même temps (World On Fire, Midnight Underground), c’est en permanence très connoté mais il y a néanmoins un truc très personnel qui s’en dégage.
Rien de vraiment générique à bien y regarder : si le son est approximatif, les morceaux sont loin de l’être et enferment pas mal de nuances dans l’écorché. C’est vif mais patraque aussi, urgent et éthéré et plutôt que la basse, c’est la guitare qui est mise en avant, ce qui n’est pas si courant dans la mare de plus en plus encombrée. Le groupe déboule, joue tout dans l’urgence puis disparaît et ce faisant, délivre un instantané qui s’accorde plutôt bien à la déliquescence actuelle.
Amalgamant des bouts de The Serfs, The Drin ou Corker, Crime Of Passing apparaît un peu comme le point central où tout se rejoint et montre qu’il se passe de drôles de trucs à Cincinnati. Et comme d’habitude, on remercie Feel It Records de documenter ces courants fourmillants et souterrains.

(leoluce)

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