L’Appel Du Vide – Metro

Date de sortie : 29 mars 2024 | Labels : It’s Eleven Records, Sabotagerecords

Sur la pochette, une tâche d’encre façon Rorschach sur fond blanc, le nom du groupe en très gros – L’Appel Du Vide – et le titre de l’album – Metro – et pas grand chose de plus à se mettre sous la dent. Ceci dit, c’est déjà pas mal, on sent bien d’emblée que tout ça va être un poil cérébral. Et comme on n’attend pas grand chose, on lance l’écoute. Ça commence par des nappes synthétiques vite rehaussées d’une rythmique et d’une guitare angulaires, le chant est en Allemand.
C’est plutôt urgent, très marqué deathrock/post-punk mais il se passe des trucs bizarres du côté de la guitare qui, plus d’une fois, sonne vraiment très punk et laisse tomber la rigidité post qu’elle est censée révérer. Alors bien sûr, tout ça ne révolutionne rien mais peu importe, le trente-cinq minutes filent à la vitesse de l’éclair et accrochent invariablement. C’est très vert-de-gris, ça sent les croûtes d’amertume que l’on gratte les dents serrées, le plâtre des murs qui se fissure, la gueule de bois et les idéaux délavés.
C’est très réussi et à bien y regarder, ça l’a toujours été, dès la démo inaugurale de 2020 où la guitare sonnait plus surf (à la Dead Kennedys) alors qu’aujourd’hui, elle a légèrement changé d’azimut (le bandcamp mentionne le Poison Idea de Feel The Darkness et c’est plutôt très bien vu), preuve qu’en labourant le même pré carré inquiet, L’Appel Du Vide n’en oublie pas pour autant de muter et d’aller de l’avant, bien loin d’être strictement bloqué sur une même formule.

Alors, ils sont quatre, débarquent de Chemnitz et jouent très resserré et c’est bien ce qui fait de Metro un premier disque dont on a tout de suite envie de parler. Il n’y a aucune pose là-derrière, les tombereaux d’amertume, d’agacement et de mal-être ne sont pas feints, ils sont juste couchés là, entre les sillons et on résonne avec. Et sous ses airs spontanés, l’album est vraiment travaillé. Il y a de vraies idées, de vraies choses à extérioriser et ça sort sous cette forme parce que c’est comme ça que ça doit sortir.
L’Appel Du Vide met tout ça dans sa tâche de Rorschach et nous, en face, on y voit la même chose qu’eux : une flaque de bile anxieuse et inflammable. L’ensemble est donc plutôt monolithique de prime abord mais à bien y regarder, pas complètement : il y a quelques îlots de souffle, quelques ouvertures par lesquelles l’air et la lumière parviennent à s’immiscer et dans ces moments-là, l’anxiété devient plus latente et la mélancolie affleure (quelques passages où la voix exclut tout le reste, abandonnant sa diction urgente pour quelques chose de plus doux ou le piano esseulé qui vient conclure Fragezeichen et le disque par exemple). Tout cela est invariablement très bien foutu et on jubile.
On se retrouve, pour faire vite et situer tangentiellement le propos, face à un cousin lointain de Pigeon mais un Pigeon plus métaphysique que politique. Quoi qu’il en soit, avec Metro, on tombe sur un lot de brûlots explosifs mais froids – Nacht en ouverture, Offenbarungseid ou Fleisch plus loin et tous les autres au final – qui ne s’éloignent jamais trop longtemps de la platine.

L’Appel Du Vide est bien difficile à réfréner et se montre alors sans appel.

leoluce

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