Date de sortie : 01 mai 2022 | Labels : Dangerhouse Skylab, Bad Health Records et Offside Records
Il fait (trop) beau, il fait (trop) chaud, tout le monde est (trop) content, les sourires barrent (trop) les visages et aujourd’hui, ça sera logiquement punk rock. Option droit devant, la bave aux lèvres et les yeux révulsés. Commando de Lyon et leur premier album qui file à toute berzingue vers… quoi, je ne sais pas mais peu importe, il faut y arriver vite. Dix titres (enregistrés depuis un moment déjà) encapsulés pour la première fois sur un vinyle bien noir serti d’une pochette bien blanche où l’on ne trouvera pas beaucoup d’informations, si ce n’est le nom du groupe en très gros, celui des quatre Commando en beaucoup plus petit, le tout encerclant une photographie en noir et blanc qui tranche avec celle de la version numérique de 2019 (qui montrait Bruno Cremer et Jacques Perrin circa La 317e section). Pourtant, ce n’est pas moins la guerre aujourd’hui que ça ne l’était déjà hier et l’ensemble demeure belliqueux. Commando a des trucs à dire, le dit généralement en moins de deux minutes et ne s’appesantit jamais.
Chaque morceau est craché et recouvre le précédent. Chaque slogan est expulsé et efface celui d’avant. Et à la fin, lorsque tout a été craché et expulsé, il ne reste plus que le silence qui devient assourdissant. Le disque a tout écrasé sur son passage, n’a pas laissé le moindre interstice lui échapper et on se rend compte qu’on l’a écouté en apnée. En même temps, le truc s’appelle Commando, on pouvait s’y attendre.
Au menu du punk rock canal historique mais canal historique de Lyon et ça m’a pas mal ramené à Haine Brigade (croisé d’un soupçon de Deletär) dans le martellement ininterrompu et le côté moins simple qu’il n’y paraît de prime abord. Et je m’arrêterai là parce qu’au final, ça ne concerne que moi et surtout quelle importance ? Pour ce qui vous concerne vous, lecteur.trice.s hypothétiques, sachez simplement qu’il faut écouter ce disque : c’est un bon vecteur de colère, il amenuise la petite boule noire qui se niche au creux du ventre et la fait sortir particules par particules via la mousse des enceintes (mais ne la fait pas disparaitre).
C’est bien évidemment très agressif, un brin nihiliste et c’est surtout jusqu’au-boutiste. La diction et les textes d’Antipathic ramènent au nom qu’il s’est choisi, la guitare (Bertrand Louche, déjà croisé chez les hardcoreux Lost Boys) balance ses balles gros calibre sur tout ce qui fait obstacle, la basse tapisse et se lance parfois dans des monologues esseulés (Gaspard Ollagnon dont je connais surtout le travail graphique [si c’est bien lui] pour Exit Verse, un autre groupe de Geoff Farina de Karate) quand la batterie matraque (Florent Triquigneaux des fastcoreux Moms On Meth et aussi, entre autres, Lost Boys ou Deletär). Avec un tel pedigree, on se doutait que Commando n’allait pas militer pour la réhabilitation des licornes et effectivement on n’est pas déçu.
Ça parle désespoir et misanthropie, ça commence par Désabusé et ça finit par Misère Humaine et ça n’édulcore pas grand chose. On pourrait croire que tous les morceaux sont des photocopies de tous les autres mais ce n’est pas vraiment le cas ; il y a des variations, des nuances, dans les chœurs (Bertrand Louche et Seb Radix) qui agissent parfois comme des contrepoints (mais pas souvent), dans le barbelé de la guitare ou le tapissage de la basse et si c’est majoritairement pied au plancher, le relief est plutôt accidenté. Le point commun au fond, c’est que tout va très vite et que le disque est à peine commencé qu’il est déjà fini, seul le changement de face permet au silence de s’immiscer.
Inutile d’en dire plus, il suffit juste d’écouter et d’entonner en cœur avec Commando ses messages d’amour d’utilité publique : « J’aime pas les gens/Je les trouve chiants » .
leoluce