Tribalism3 – April On Mars

Tribalism3 en haut à gauche sur une belle pochette ondoyante ou le rouge côtoie l’orangé, le mauve et le bleu. April On Mars en bas à droite sans qu’on ne sache vraiment qui du mois ou de la planète prend le dessus. Cinq petits titres et puis s’en va. D’emblée, tout cela se montre un brin énigmatique. Au dos, on identifie le logo de COAX et quelques noms qui lui sont régulièrement associés : Yann Joussein à la batterie (et aux compositions), Olivia Scemama à la basse et Luca Ventimiglia aux claviers et bidouilles électroniques. Pas vraiment des inconnus pour qui aime flâner dans les allées métamorphes du turbulent collectif.
On a par exemple déjà croisé, entre autres, les deux premiers (à la contrebasse pour l’une, toujours à la batterie pour l’autre) sur le très dense et délicat Lumière, Eau Et Minéraux de Wonderbach sorti il y a presque un an mais aussi au cœur de TRIBALISM, pièce mouvante pour sept musiciens et trois danseurs écrite par toujours Yann Joussein et chorégraphiée par Claire Malchrowicz. Tribalism3 en est une émanation, un appendice et on n’ira pas plus loin dans la petite histoire de ce passionnant trio par peur de multiplier les mots devant les parcours déjà riches et fortement mélangés de chacun.
En gros, ce qu’il faut retenir, c’est que ces trois-là se connaissent par cœur et que leur association était obligatoire étant donné ce qu’ils sortent de leurs doigts lorsqu’ils occupent le même espace. En 2019, トライバリズム avait déjà largement planté le décors, April On Mars fait bien plus que confirmer : pour l’exploration et la transe, Tribalism3 est un incontournable. Il suffit de lancer le disque, laisser la musique advenir, la sentir doucement virevolter à la sortie des enceintes et la regarder tordre l’espace et le temps. On se retrouve très vite en soi-même, bercé par le ressac (puis le clapotis qui peut devenir grosse tempête) de ces morceaux très répétitifs qui agrippent fortement et au final, on se sent irrémédiablement bien dans ce disque qui apparaît un poil plus organique (et donc moins synthétique) que le premier.

Pourtant, rien n’a fondamentalement changé : les claviers cosmiques et la freeture perdurent, les percussions profondes aussi et la basse fournit des lignes toujours fracassées mais Tribalism3 donne l’impression d’avoir tout resserré et s’il ne fait aucun doute qu’il s’agit du même trio, on ne confondra pasトライバリズム et April On Mars. On ne trouvait rien dans le premier d’aussi terre-à-terre que l’éponyme d’ouverture et son parterre polyrythmique grouillant, ses claviers ascensionnels et son groove haché. Plus tout à fait la tête dans les étoiles mais les pieds bien ancrés au sol, à sentir les ondes rebondir à l’intérieur du corps.
C’est qu’April On Mars est très chaleureux. Ses vingt-six minuscules minutes ont beau explorer à tout va, elles ne sont jamais absconses ou volontairement hermétiques. Ça passe sans sourciller d’un charivari percussif et profond (Bongos Excerpt le bien nommé) à quelque chose d’ultra-répétitif qui a l’air tout plat mais est très loin de l’être (la superbe Sonia In Casa) avant de bifurquer vers une ossature tangentiellement metal où la basse montre les crocs et s’oppose à un drone cosmique (l’excellent Peach) et à chaque instant, on ressent bien le plaisir évident que Tribalism3 prend à jouer.
Au final, on pourrait reprocher à April On Mars sa courte durée (en même temps, c’est un EP) mais on voit bien à quel point le trio nous enferme dans ses filets en quelques mouvements : inutile d’allonger le temps quand la transe fonctionne déjà à plein et que quelques minutes suffisent à s’évader.
En tout cas, on sait gré au collectif COAX d’une nouvelle fois faire mouche en sortant ce très bel objet et on attend de Tribalism3 impatiemment la suite en se demandant où ses tribales improvisations le porteront alors.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *